
Depuis le 30 août 2023, date marquant la chute du régime Bongo, le nouveau pouvoir conduit par le Général Brice Clotaire Oligui Nguema se trouve confronté à une série de questionnements profonds et légitimes émanant de la société civile. Parmi les voix citoyennes les plus persistantes et structurées, celle de notre compatriote Martinez Nang Obiang se distingue par sa clarté. Il met en lumière quatre préoccupations majeures, autant de reflets fidèles des attentes populaires.
Le premier point concerne la situation critique de la Société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG). Après avoir été privatisée puis renationalisée, l’entreprise continue d’accumuler les dysfonctionnements : coupures d’électricité récurrentes, pénuries d’eau, infrastructures vétustes… Le quotidien des populations est rythmé par ces carences structurelles. La sortie de crise passe par une restructuration d’envergure, tant sur les plans technique, financier que managérial. Cela suppose la révision du contrat de concession, une augmentation substantielle des investissements publics, l’ouverture encadrée à la concurrence et surtout une gouvernance transparente, inclusive, en lien avec les collectivités locales.
Deuxième interrogation : celle de la légalité et de la reconnaissance de l’activisme dans le cadre institutionnel actuel. L’activisme, tel qu’il s’exprime aujourd’hui, est le signe d’une société en éveil, mais il évolue hors de tout cadre juridique formel. Pour certains, le constitutionnaliser serait une avancée démocratique majeure, à l’instar de ce qui a été fait au Sénégal ou au Burkina Faso. Reconnaître juridiquement le droit à la contestation pacifique, c’est structurer l’engagement citoyen tout en le protégeant des dérives. Il conviendrait donc d’instaurer des mécanismes clairs pour encadrer et sécuriser cette forme d’expression collective.
La troisième préoccupation concerne la nature des relations entre la France et le Gabon dans le contexte de la transition. Marquées historiquement par une certaine opacité, ces relations pourraient connaître un tournant. La Cinquième République gabonaise offre l’opportunité d’un nouveau départ : celui d’un partenariat fondé sur le respect mutuel, la souveraineté nationale et des intérêts équilibrés. Il s’agirait de revisiter les accords bilatéraux, d’élargir le cercle des partenaires économiques et diplomatiques, et d’affirmer plus fortement les priorités nationales dans les négociations internationales.
Enfin, la dernière grande attente porte sur le respect du calendrier électoral. Les scrutins législatifs et locaux annoncés pour 2025 seront un test décisif pour la crédibilité du régime de transition. Tenir cet engagement nécessite des conditions minimales : des listes électorales fiables, une administration électorale indépendante, un code électoral concerté. Tout report sans justification valable serait perçu comme une trahison de la parole donnée et affaiblirait la légitimité de l’ensemble du processus de transition. Le peuple gabonais aspire à voter librement et à être représenté de manière équitable.
Ces interrogations, loin d’être de simples spéculations intellectuelles, traduisent une urgence réelle. Le moment est venu pour le pouvoir de dépasser le stade du discours et de co-construire, avec l’ensemble des citoyens, un modèle nouveau : celui d’un Gabon juste, inclusif, souverain et responsable.